Pic des émissions de CO2 : une hausse record attendue en 2025 ?

Le chiffre sidère : plus d’un tiers de l’électricité mondiale provient encore du charbon, alors que les renouvelables battent chaque année de nouveaux records. En 2023, d’après l’Agence internationale de l’énergie, les émissions de CO2 liées à l’énergie ont grimpé jusqu’à 37,4 milliards de tonnes. La marche vers la sobriété carbone n’a jamais paru si raide.

En Asie, la demande en énergie annule quasiment les efforts consentis ailleurs. Les prévisions pour 2025 ne laissent guère de place à l’optimisme : la consommation de charbon repart à la hausse, portée par l’appétit de plusieurs économies émergentes. La technologie avance, les politiques de transition s’affichent, mais la courbe, elle, ne plie pas.

Où en sont réellement les émissions mondiales de CO2 aujourd’hui ?

Le volume annuel des gaz à effet de serre issus des énergies fossiles ne baisse pas. Selon le Global Carbon Project, 2023 s’inscrit comme une année noire : 36,8 milliards de tonnes de CO2 rejetées, du jamais vu depuis les débuts de l’industrialisation. La pente reste ascendante, même si la cadence ralentit par rapport aux dix dernières années.

Pour le professeur Pierre Friedlingstein, qui pilote le consortium, le charbon et le gaz restent des piliers massifs de nos émissions. Les chiffres stagnent en Europe et aux États-Unis, mais la Chine et l’Inde, moteurs de la croissance asiatique, font grimper la moyenne mondiale. Ce déséquilibre met à mal les efforts déployés pour contenir le réchauffement.

Le chercheur Glen Peters (CICERO) l’affirme sans détour : « Le budget carbone fond, tandis que la demande de gaz et de pétrole reste élevée ». À l’échelle mondiale, la France ne pèse qu’une goutte d’eau : à peine 1 % des émissions, loin derrière les mastodontes asiatiques.

Quelques repères pour mesurer l’ampleur du phénomène :

  • Emissions mondiales en 2023 : 36,8 milliards de tonnes de CO2
  • Part des énergies fossiles : plus de 80 % du mix énergétique mondial
  • Budget carbone restant : estimé à moins de 7 ans au rythme actuel pour contenir le réchauffement sous 1,5 °C

Face à cette progression, la capacité des engagements internationaux à enrayer la dynamique climatique interroge. La communauté scientifique ne cesse d’appeler à une rupture nette, faute de quoi le budget carbone planétaire sera vite dépassé.

Pourquoi la demande en charbon reste-t-elle un moteur clé de la hausse des émissions ?

Le charbon n’a pas dit son dernier mot. Sa consommation tutoie encore les sommets, malgré les avancées du solaire et de l’éolien. Plusieurs raisons expliquent cette résilience. D’abord, le coût du gaz joue au yoyo, poussant de nombreux pays à choisir le charbon, jugé plus prévisible et abordable pour produire de l’électricité. Depuis la guerre en Ukraine, la flambée des prix de l’énergie a accentué ce phénomène, surtout en Asie.

La Chine et l’Inde, à elles seules, pèsent lourd dans la balance. Leur dépendance au charbon s’explique : il fournit une énergie stable et bon marché à des populations en expansion et à des industries voraces. Certes, la transition vers des solutions moins carbonées avance, mais pour l’instant, le charbon demeure central dans leur stratégie énergétique.

En Europe, la dynamique s’inverse : le recours au charbon décline, mais la fermeture rapide du nucléaire en Allemagne a provoqué un regain temporaire de centrales à charbon. Outre-Atlantique, aux États-Unis, la part du charbon recule, mais il n’a pas totalement disparu du paysage, malgré les annonces politiques successives.

Pour mieux cerner les forces en jeu, quelques points saillants :

  • Le charbon fournit encore plus de 35 % de l’électricité mondiale
  • L’Asie absorbe plus de 75 % de la consommation totale
  • La hausse des prix du gaz encourage cette tendance dans nombre de pays émergents

Ce recours massif au charbon explique largement la probabilité d’une nouvelle augmentation des émissions de CO2 en 2025, malgré les alertes répétées des climatologues.

Prévisions pour 2025 : vers un nouveau pic historique des émissions fossiles

Le cap ne change pas : la courbe des émissions de gaz à effet de serre reste obstinément orientée vers le haut. Selon le Global Carbon Project, dès 2025, la planète pourrait franchir un nouveau sommet, dépassant 37 milliards de tonnes de CO2 issues des énergies fossiles. Cette prévision s’appuie sur des tendances qui s’installent : la demande soutenue en pétrole et en gaz, la consommation de charbon qui ne décroche pas, et des politiques de réduction des émissions qui tardent à produire leurs effets.

Les scénarios convergent autour d’un constat : le budget carbone permettant de limiter le réchauffement à 1,5 °C diminue dangereusement. À ce rythme, il ne resterait que six années de marge, d’après Pierre Friedlingstein, soit moins de 250 milliards de tonnes de CO2 à émettre. Le PNUE souligne que l’écart entre promesses nationales et émissions réelles s’accentue.

Voici les projections principales à retenir :

  • 37,4 milliards de tonnes de CO2 attendues en 2025
  • Le budget carbone compatible 1,5 °C bientôt atteint
  • Les énergies fossiles gardent la mainmise sur le mix mondial

Sans un revirement rapide, la COP30 de Belém risque d’être placée sous le signe de l’urgence. Les experts du Climate Action Tracker mettent en garde : chaque année passée sans infléchir la courbe rend l’objectif des 2 °C encore plus difficile à atteindre.

Jeune femme avec masque à l

L’écart se creuse entre trajectoires réelles et objectifs climatiques internationaux

Le fossé continue de s’élargir entre les engagements pris sous l’accord de Paris et la réalité des émissions sur le terrain. Les derniers rapports du GIEC et du PNUE le rappellent : la trajectoire actuelle ne permet pas de rester sous le seuil des 2 °C de réchauffement. D’après le Climate Action Tracker, les politiques déployées à ce jour mènent tout droit vers une hausse de température comprise entre 2,5 et 2,9 °C d’ici la fin du siècle.

La baisse des émissions, pourtant affichée comme une priorité, reste largement théorique. Les nations industrialisées, moteurs historiques de la crise climatique, peinent à transformer leurs promesses en actions concrètes. Laurence Tubiana, l’une des architectes de l’accord de Paris, tire la sonnette d’alarme : « L’écart entre les paroles et les actes affaiblit la crédibilité des négociations internationales. » Côté ONU, de nombreux observateurs pointent le manque de plans détaillés derrière les annonces de neutralité carbone prévues pour 2050.

Quelques éléments illustrent ce décalage persistant :

  • Des écarts croissants entre bilans nationaux et objectifs de Paris
  • Un déficit de transparence sur la mise en œuvre réelle des politiques climatiques
  • Une pression grandissante sur les prochaines COP pour rectifier la trajectoire

Le contexte se complique aussi avec le retour de certains grands acteurs sur la scène énergétique. L’exemple des États-Unis, qui avaient quitté l’accord de Paris sous Trump, en est un signe frappant. Cette instabilité politique pèse lourd dans la balance des engagements mondiaux. Pour les experts du Climate Action Tracker, sans une réduction massive et rapide des émissions dans la décennie à venir, les objectifs climatiques internationaux resteront hors d’atteinte. Reste à savoir si la planète choisira d’accélérer la rupture ou de s’habituer à la surchauffe.

L'actu en direct